Depuis fin octobre 2020, l’Hôtel-Dieu de Pont-l’Abbé dans le Finistère a mis en place une alternative à l’EHPAD. Ce dispositif du groupe HSTV (Hospitalité Saint-Thomas de Villeneuve) se nomme VIVAM. Comme dans beaucoup d’autres départements français, la population locale autour de Pont-l’Abbé est très âgée. Elle serait même supérieure en comparaison à la moyenne française ou celle de la Bretagne. Or, le nombre de places en EHPAD n’est pas suffisant pour accueillir tout le monde. Qui plus est, les personnes âgées désirent avant tout rester chez elles.
En créant ce dispositif, la volonté de l’Hôtel-Dieu de Pont-l’Abbé est de permettre aux séniors de continuer à vivre chez eux dans les meilleures conditions. Notre rencontre avec Mme Carpentier, infirmière coordonnatrice de cet établissement, a été l’occasion de mieux comprendre le fonctionnement de VIVAM. Une opportunité également de voir les bénéfices et les difficultés rencontrés dans la mise en œuvre de ce système hors les murs.
Comment orchestrer un dispositif d’EHPAD à domicile
La première étape lors de la mise en place du service VIVAM a été de mettre en place une commission, composée du médecin du dispositif, de 3 représentants, de l’infirmière coordinatrice et d’un invité permanent du CLIC.
La commission décide de l’entrée d’une personne dans le programme selon des critères d’éligibilité. Ces critères sont communs aux cinq dispositifs mis en place, que ce soit Bain-de-Bretagne, Rennes, Plougastel, Saint-Germain ou Baguer-Morvan.
Les 3 principaux critères sont :
- L’âge : avoir plus de 60 ans
- Le GIR (groupe iso-ressources) : le niveau de perte d’autonomie doit être entre 1 et 4
- Le lieu de résidence : le Pays Bigouden.
Les commissions se tiennent chaque mois, et permettent d’effectuer le suivi des 30 bénéficiaires, et de renouveler la liste d’attente.
Afin d’offrir un confort de vie optimal à chacun, une équipe pluridisciplinaire a été mise en place, composée de 3 aides-soignantes à temps plein, un ergothérapeute, une psychologue et un médecin coordinateur gériatre à temps partiel. Si le travail autour des capacités restantes des usagers est primordial, leur rôle va plus loin, puisqu’ils les accompagnent à la fois dans le maintien des gestes du quotidien et dans leur vie sociale. Ce qui signifie qu’il faut pouvoir intervenir fréquemment chez chaque usager. Par exemple, l’équipe des aides-soignantes se rend au domicile des personnes entre 2 à 3 fois par semaine en moyenne.
EHPAD à domicile : bénéfices et difficultés
Les personnes âgées bénéficiant de ce service n’ont pas à s’adapter à une institution. C’est un point fort, l’individu étant mis au cœur du dispositif. Les équipes ont notamment pu remarquer les effets positifs sur le moral des bénéficiaires. Et ce constat est vrai aussi bien chez les personnes isolées que chez celles qui ne le sont pas.
« Nous participons à une étude universitaire sur l’amélioration de la thymie chez les usagers depuis la mise en place de VIVAM » nous précise Véronique Carpentier.
Par ailleurs, d’autres bénéfices ont été constatés :
- La réduction de l’anxiété,
- L’apport d’une réassurance pour certains usagers qui n’osaient plus sortir de chez eux,
- L’assurance d’être pris en charge par des experts de la gériatrie.
Pourtant, après 1 an, les équipes ont aussi noté une limite quant au travail sur les capacités restantes des bénéficiaires. En effet, il n’y en a parfois plus du tout, car les troubles cognitifs sont trop avancés, ce qui peut amener les intervenants à domicile à être surtout dans l’occupationnel.
Du côté de l’organisation de l’équipe, certains freins ont été notés :
- La gestion de l’espace-temps chez les usagers. En effet, beaucoup d’autres professionnels passent à domicile : il faut donc trouver un créneau disponible.
- Les aléas du trafic routier (le pays Bigouden est une zone très touristique) qui réduit le temps passé au domicile.
VIVAM : un système hors les murs à déployer
Le projet va durer 3 ans, et les quelques difficultés rencontrées depuis un an ne sont pas insurmontables. Véronique Carpentier, infirmière coordinatrice du VIVAM, croit fermement en l’avenir de l’EHPAD à domicile. Non seulement parce que la population âgée augmente considérablement, mais aussi parce que les personnes aspirent à rester le plus longtemps possible chez elles. Elle nous a confié :
« J’en suis convaincue, il faudra généraliser ce dispositif »
Pour maintenir le cap et offrir un service adapté, cela supposera de développer un réseau de professionnels encore plus important. Pourquoi ne pas intégrer d’autres spécialistes au sein de VIVAM ? Avoir une diététicienne dans l’équipe par exemple. En effet, la dénutrition est un sujet important chez les personnes âgées. De même, intégrer un psychomotricien sera un atout.
En parallèle des actions humaines, le dispositif doit être appuyé par des moyens techniques et technologiques. Ils aideraient à une meilleure gestion des équipes :
« Il serait pertinent de travailler sur un outil de communication commun et sécurisé. Une sorte de cahier numérique partagé entre tous les professionnels intervenant à domicile. »
Par ailleurs, ces moyens technologiques permettent aussi de mieux sécuriser le domicile, en ayant recours aux objets connectés de Telegrafik par exemple. À ce sujet, le retour des familles est très positif. Si au début, elles n’étaient pas convaincues, elles mesurent aujourd’hui pleinement la plus-value de ces installations pour leurs aînés.